Lors d'une ballade le long du littoral, de Saint
Paul, nous sommes arrivés, par hasard, sur le lieu d’une cérémonie funéraire de Tamouls Indous.
Pour les Tamouls, la mort est un passage, une étape dans le cycle du samsara, mais aussi l'occasion d'un rite de perfectionnement. La mort met un terme à une existence et les survivants doivent profiter de l'état intermédiaire dans lequel se trouve l'âme du défunt pour l'honorer et la mettre en valeur, de façon que celle-ci jouisse du meilleur sort possible lors de sa prochaine existence.
Le rite funéraire Tamoul s’étendait sur plus d’un an et demandait une grande disponibilité de la famille. Il évolue et s’adapte aux exigences du monde actuel. Les lieux et l’environnement ne sont plus les mêmes. Plusieurs façons de faire ont changé. La durée des cérémonies est souvent plus courte. Une des plus importantes évolutions touche à la participation des femmes au rituel funéraire et à leurs responsabilités.
L’essentiel du rituel a été conservé, tout comme le souci de transmettre la tradition. Ce qui leur importe, c’est d’exécuter le plus fidèlement possible pour leurs parents le rituel funéraire de la même façon que ceux-ci l’avaient accompli pour leurs propres parents, tout en espérant que leurs enfants feront de même à leur tour au moment de leur mort.
Nous sommes restés plus de deux heures à partager avec eux ce moment.
Les photographies de cet article ont été prises, avec l'accord des participants, à une distance relativement importante, permettant de ne pas perturber la cérémonie. Les conditions de prises de vue étant difficiles (luminosité très forte à cet instant de la journée associée à des zones d'ombres importantes) la qualité des photos n'est pas toujours optimale.
Mais elles représentent à mes yeux de grands moments d'émotion
et c'est pourquoi j'ai choisi de les partager avec vous
Le prêtre officiant délimite une aire sacrée
On procède à la désignation d’un kartta. Ce terme est dérivé d’une racine sanskrite signifiant “action”, “création”. Tout au long du rituel funéraire qui s’étend souvent sur un mois complet, le kartta doit se rendre disponible pour présider les rituels et en garantir le bon déroulement. C’est le fils ainé de la maison qui est le plus souvent chargé de ce rôle.
Le kartta se purifie
Aux cendres, le kartta ajoute quelques morceaux d’os et place le tout dans deux récipients de terre cuite, un plus gros et un petit. Il pénètre ensuite dans l’eau jusqu’à mi-corps et laisse tomber par-dessus son épaule le principal pot de cendres. Le petit pot de restes est ramené à la maison du défunt et conservé à l’extérieur du foyer jusqu’au terme du deuil.
Purification des membres de la famille
On fait le "karlmadi" pour que l'âme monte au ciel. On coupe les cheveux et la barbe du fils ainé
On fait tremper dans de l'eau 3 variétés de légumes secs, on les pile et on les mélange avec 3 qualités d'huile.On se passe ces mélanges dans les cheveux.
Le prêtre officiant délimite une nouvelle aire aire sacrée
On place des feuilles de bananier en forme d'autel sur lesquels on pose bananes, encens... On casse un coco puis on brûle de l'encens et du camphre. On enduit ensuite des baguettes de bois de lait ou de manioc de beurre clarifié ou d'huile de coco.
Le rite sur la plage prend fin.
Le prêtre officiant dépose sur le front des participants de la cendre
Le karrta est revêtu de l'ensemble vesti-calvai et orné d'une couronne de fleurs.
Il emporte la petite urne contenant le reste des cendres.
Nous pensons que dans notre monde en perpétuelle mutation, l’enracinement dans une tradition ne doit pas être vécu comme un repli identitaire, mais il doit nous donner les repères essentiels pour pouvoir avancer vers le futur sans nous égarer dans des nombreux dédales.
Nous croyons que, à l’instar de toutes les communautés humaines, la communauté tamoule doit savoir s’adapter et évoluer pour continuer à exister sans perdre son âme.
La revendication identitaire ne signifie pas repli communautaire et ne se pose pas en termes de conflits et d’affrontements, mais doit plutôt se fonder sur un dialogue inter-culturel et inter-religieux sincère et constructif.
Dans le grand concert des cultures du monde qui doivent s’exprimer dans leur diversité, chaque note apportée contribue à l’harmonie de l’ensemble. Il s’agit tout simplement pour nous de mieux connaître nos richesses pour mieux les partager.
C’est la définition même de notre vivre ensemble à l’île de la Réunion.
© Dr Selvam Chanemougame, 2011
splendide, le reportage est très bien fait.... tout y est. Merci à toi du partage
RépondreSupprimeret le texte du Docteur selvam Chanemougame est le bienvenu.
Merci Laurence
SupprimerVenant de toi, avec la qualité des photos de ton site, celà me fait doublement plaisir
Bruno, Merci de m'avoir fait bénéficier de ces images en avant première. En dehors du caractère documentaire de ces photos, et des commentaires extrêmement renseignés, je retrouve quelque part, des sentiments du dernier voyage que nous avons fait en Indes, sérénité, couleurs, respect, et traditions.
RépondreSupprimerCes si-entiments transparaissent de tes clichés , et il y en a un en particulier
Suite: qui m'a marqué, outre la première qui est magnifique, il s'agit de celle en cadrage vertical, avec le parasol qui semble telle une auréole protégeant l'aire sacrée et , l'âme du défunt. joli "travail".
RépondreSupprimerMerci Jeff,
SupprimerJ'ai hâte, de voir les photos que tu as ramené d'Inde et d'échanger, autour d'un verre, sur nos 'émotions' de voyage.